Giono. Impromptu 8. Mise au point.
Je dédie ces pages à Serge Fiorio dont l'œuvre peint respire à la même hauteur que l'œuvre écrit de son cousin Giono.
Pierre Magnan. Pour saluer Giono.
Venant de mettre le nez dans une liasse d'articles de journaux - certains encore assez récents - dont les auteurs, par pure méconnaissance, s'appliquent à ne pas voir Serge autrement qu'en « peintre-naïf-cousin-de-Gi-ono », j'en sors, je dois le dire, l'esprit passablement navré !
En effet, quel radotage intensif ! Quelle vieille antienne ! Et quel détricotage à faire, donc, pour désactiver - il est temps, toujours temps ! - l'impact de pareilles billevesées et balivernes ayant, à cette heure tardive, encore cours malgré tout sur le marché !
C'est qu'à force d'avoir été, et d'être encore, rabâché et colporté à l'envi, ce double cliché s'est, du coup, assez confortablement installé dans le commun des esprits, l'esprit de ceux qui, en le cas, se contentent là de chemins tout tracés vite parcourus.
Pierre Magnan, cité en exergue, se trouvant être l'éclatante exception qui confirme la règle. Alors, merci encore à lui de peser à jamais de tout son poids avec force - par la grâce d'une seule, simple et unique phrase ! - sur l'autre plateau de la balance pour en rétablir sous nos yeux le juste équilibre !
Naïf qui le croit naïf, car Serge ne l'a jamais été dans son métier : derrière les apparences d'une simplicité qui - déjà rare pourtant, si particulière - ne devrait pas même arriver, à elle seule, il semble, à tromper bien longtemps l'amateur plus ou moins éclairé, sa peinture est d'une tout autre trempe que celle habituelle aux naïfs.
Bien qu'étant - ou, mieux, parce qu'étant - celui d'un autodidacte, son art de peindre est, celui-là, savant de la bonne science, en vérité savantissime, mine de rien. Peu en possèdent peut-être encore un de pareille force aujourd'hui même, aussi sensible et efficace, pour s'exprimer tout autrement qu'à la va-vite et en surface.
Cousin de Giono, c'est à proprement parler Émile, son père, qui l'était (dans l'esprit de Magnan qui l'emploie, certes, c'est sans - clair et net - qu'une telle appellation porte en douce préjudice) ; et si les univers d'artistes parfois se croisent ou même correspondent, se renforcent l'un l'autre, communiquent sur certains registres de création, il n'y a pas de quoi, en le cas, atteler sans vergogne - par grave méconnaissance ? - le grand peintre à la remorque du grand écrivain ! C'est pourtant quasi systématiquement ce qui se passe, et faï tira Marius ! comme on dit en Provence.
Ce n'est pas là parti pris de ma part, l'attelage en ordre inverse me contrarierait tout autant, considérant l'un et l'autre comme des créateurs autonomes.
Serge et Giono se sont souvent fréquentés, échangeant beaucoup il est vrai, au temps de la jeunesse haute-savoyarde du peintre, entrecoupée de quelques mémorables séjours bas-alpins à Manosque. Puis, dès juste avant le début de la dernière guerre, chacun a fait route sans jamais se soucier de l'autre, pas même par courrier.
Si Serge s'est par la suite rendu plusieurs fois en visite dans la famille Giono au Paraïs dès qu'il fut ancré en haute-Provence, en revanche - qui le croira ? -, Giono n'a jamais posé une seule fois le pied dans l'atelier de Serge à Montjustin, ni visité aucune de ses pourtant nombreuses expositions.
Serge photographié dans son atelier, non en compagnie mais en présence de Giono...
Qu'on ne voit pas là même une once de reproche, c'est juste une constatation propre à démentir certains propos faux ou abusifs d'une légende dorée inventée par la gent journalistique de tout bord et de tout poil à laquelle Serge, prêtant lui-même le flanc par mégarde et négligence, a parfois servi de témoin et de faire-valoir en acceptant, toujours de bonne grâce, de jouer le rôle - "écrit" d'avance une fois pour toutes - qui lui était destiné, assigné, dans le seul but, inavouable évidemment, de faire ainsi vendre encore un petit peu plus de papier journal.
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