C'est là, hélas, la seule photographie que nous ayons de ce Portrait très à l'italienne réalisé à Taninges en 1934, après celui de Giono peint la même année à Manosque, en trois semaines, dans le bureau même de l'écrivain.

Il s'agit d'une commande du modèle, Madame de Candolle, une descendante directe des célèbres botanistes suisses Augustin Pyrame de Candolle 1778-1841 et Alphonse Pyrame de Candolle 1806-1893, son fils, qui poursuivit l'œuvre maîtresse de son père — Regni vegetabilis systema naturale — aidé de son propre fils Anne Casimir.

Le personnage paraît être des plus étranges, énigmatique, comme les affectionnaient alors en ce temps les surréalistes. Je crois d'ailleurs que ce portrait n'aurait eu aucun mal à emporter l'adhésion et même à susciter le plein enthousiasme d'André Breton lui-même.

Les deux mains présentées en évidence devant lui par le modèle sont, malgré son encore relative jeunesse, comme les deux uniques cartes — restantes ? — de son destin. De plus, elles sont en forme de tête d'animaux peintes de profil, animaux sortis tout droit d'un bestiaire aussi mystérieux qu'étonnant ; la pierre qu'on imagine précieuse de chacune des bagues portées figurant l'œil de chacun : là, Jérôme Bosch n'est pas loin. Le visage anguleux et ferme, encadré, plus que coiffé, d'une chevelure strictement stylisée, sans grande fantaisie féminine, contribue à rendre ce personnage froid et particulièrement inquiétant. Il l'est par son regard transperçant surtout, singulier, et aussi par sa bouche exagérément désignée comme signe par le peintre.

Sur la droite se devine un lourd rideau ou une tenture tirée qui découvre le paysage qui s'encadre derrière le personnage dans ce qui paraît être une fenêtre - et est peut-être aussi bien un miroir - dans laquelle se trouve, ou alors se reflète, un territoire parfaitement à la Serge. Où est le réel, où est l'imaginaire ? En peinture, les miroirs sont des fenêtres et les fenêtres des miroirs, pouvant se refléter, dans un sens comme dans l'autre, les uns dans les autres, en abyme ou en trompe-l'œil.

Deux autres choses sont fortement frappantes : la qualité et le caractère du paysage justement. C'est incroyable à quel point, peint en 1934, celui-ci est prémonitoirement semblable en de nombreux points caractéristiques à un certain nombre (important) de ceux que peindra Serge bien plus tard en Haute-Provence. C'est à s'y méprendre, comme si le jeu de miroir dont je parlais tout à l'heure jouait aussi ici à travers le temps dans le creuset même de l'œuvre, sa genèse. En cela s'épaissit aussi en même temps — mais donc sur un tout autre plan — de façon conséquente le mystère de cette bien étrange toile.

Le jeu de la lumière est lui aussi troublant au possible par un contraste très important, fort rare, entre intérieur et extérieur ; le personnage se situant, émergeant de l'ombre comme une apparition, à la lisière. Le tableau, lui, baigne tout entier dans une forme d'inquiétante étrangeté dont Freud aurait peut-être su, lui, en spécialiste, trouver la clé.

Sur le même sujet dans l'ordre de parution :

Retour sur image, par Gérard Dressay.

Madame de Candolle fait à nouveau rêver, par Michel Kreutzer.

Sur le portrait de Giono de 1934 : Les tribulations du premier portrait de Giono

Traduction de notre ami Agostino Forte — qui, par ailleurs nous a fait parvenir ce portrait d'Augustin-Pyramus de Candolle peint en 1822 par Pierre-Louis Bouvier (1766-1836).

Un Ritratto del 1934

È purtroppo l' unica fotografia rimasta di questo Ritratto molto all’italiana realizzato a Taninges nel 1934, dopo quello di Giono eseguito nello stesso anno a Manosque, nello studio dello scrittore, in tre settimane.

Si tratta di una commessa da parte di Madame de Candolle, discendente per acquisizione dei celebri botanici svizzeri Augustin Pyrame de Candolle (1778-1841) e del figlio Alphonse Pyrame de Candolle (1806-1893) che proseguì l’opera maestra del padre, il Regni vegetabilis systema naturale, aiutato dal figlio Anne Casimir.

Il personaggio appare essere dei più strani, enigmatico, come li prediligevano allora i surrealisti. Credo d’altra parte che questo ritratto non avrebbe fatto nessuna fatica a ricevere l’adesione e suscitare il sicuro entusiasmo dello stesso André Breton.

Le due mani della modella poste in bella mostra davanti a sé sono le due uniche carte (rimaste?) del suo destino, malgrado la sua ancora relativa giovinezza,. Inoltre esse si presentano in forma di teste d’animali ritratte di profilo, animali usciti difilato da un bestiario tanto misterioso quanto sorprendente mentre la pietra, presumibilmente preziosa, incastonata su ognuno degli anelli pare esserne il rispettivo occhio: un taglio alla Jeronymus Bosch. Il volto angoloso e fermo, incorniciato - più che ricoperto - da una capigliatura assolutamente stilizzata e senza particolare gusto femminile, contribuisce a rendere freddo e piuttosto inquietante il personaggio. In particolar modo per il suo singolare sguardo che trapassa ma anche per la bocca esageratamente designata come segno dal pittore.

Sulla destra si distingue una pesante tenda o un tendaggio tirato lateralmente a scoprire il paesaggio che si inquadra dietro il personaggio in quella che sembra essere una finestra o comunque uno specchio nel quale viene a trovarsi, o si riflette appunto, un territorio perfettamente Sergesco. Dov’è il reale, dov’è l’immaginario? In pittura gli specchi sono delle finestre e le finestre specchi, potendo riflettersi (in un senso come nell’altro) gli uni negli altri, collocati nell'infinito o in trompe-l'œil.

Due altre cose colpiscono particolarmente: la qualità e il carattere del Paesaggio naturalmente. È incredibile fino a che punto, dipinto nel 1934, si preannunci simile in parecchi elementi caratteristici a un certo numero (considerevole) di quadri realizzati da Serge molto più avanti in Alta Provenza. C’è da essere tratti in inganno dalla sua genesi, come se l’effetto dello specchio di cui parlavo pocanzi giocasse anche qui attraverso il tempo nel crogiolo stesso dell’opera. Ciò contribuisce a infittire in maniera significativa – ma quindi su tutt’altro piano – il mistero di questa curiosa tela.

Anche il gioco di luce è estremamente sconcertante per un contrasto notevole, rarissimo, tra dentro e fuori: emergendo dall’ombra come un’apparizione, il personaggio se ne situa al limite. Il quadro è immerso in un’aura di inquietante straneità della quale Freud, da specialista, avrebbe saputo trovare la chiave.

Un Portrait de 1934.

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