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Serge Fiorio - 1911-2011.
Serge Fiorio - 1911-2011.
  • Actualités de l'œuvre et biographie du peintre Serge Fiorio par André Lombard et quelques autres rédactrices ou rédacteurs, amis de l'artiste ou passionnés de l'œuvre. Le tout pimenté de tribunes libres ou de billets d'humeur.
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Serge Fiorio - 1911-2011.
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17 novembre 2016

Riches heures de haute époque.

   Après un court premier emploi, fort ennuyeux pour lui, où il se morfond à plier et empaqueter costumes et pièces de tissus diverses au service d'un marchand drapier, de quatorze à vingt-cinq ans Serge travaille, alors décidément de bon cœur, à la carrière paternelle où, ouvrier-carrier parmi les ouvriers-carriers - la plupart immigrés piémontais - cassant du caillou à la masse, remplissant les wagonnets de gravier sous l'assourdissant concasseur, logeant au besoin comme eux, à plusieurs, dans des frustes baraquements de chantier au confort - on l'imagine bien - des plus sommaires, chantant avec eux à tue-tête, souvent ensemble tous en chœur, préparant aussi bien les coups de mine que la minestra et le ragoût qui constitueront, au soir, le repas pris en commun, il se fait là des muscles dans tous les sens du terme. Un nouveau monde s'ouvre à lui et il en a conscience.

Parce qu'il était un enfant-ado chétif, souvent malade pour un rien, le vieux et sage médecin de famille avait fini par conseiller à ses parents, pour tout remède à ses maux variés, de l'embaucher au plus tôt au « chantier » - c'est ainsi que chez les Fiorio l'on désignait la carrière - et de le nourrir essentiellement de polenta ! "Ordonnance" aussitôt suivie avec confiance à la lettre comme étant - ce qu'elle fut en vérité - la voie providentielle conduisant vers une meilleure santé générale puis, vite, vers la guérison complète.

Effectivement, toutes ces heures de travail pénible effectuées au grand air en toutes saisons, procurent à son jeune corps malingre l'occasion d'une foule d'exercices physiques prompts à en parfaire l'harmonieux développement, tandis qu'elles sont aussi pour l'esprit du jeune homme, dans le même temps, édifiantes leçons d'une école de vie où, pour sa gouverne personnelle, il apprend beaucoup auprès de chacun, tous y étant bien plus âgés que lui. Aussi, au bout de quelques mois seulement, voilà tout son être transformé, renaissant en quelque sorte, consolidé au plan du corps comme à celui de l'esprit, le faisant désormais se sentir détenteur de forces nouvelles, d'acquis salutaires, aptes à lui faire envisager fort sereinement l'avenir. Avec, de surcroît, la certitude intérieure non négligeable du tout de s'en être sorti ainsi, loin de toute formule toute faite : par lui-même courageusement vainqueur de lui-même et de ses faiblesses !

« Cette dizaine d'années de vie de travail à la dure m'a beaucoup marqué et, à mon grand bonheur, ce temps-là est resté pour moi, toujours à disposition dans ma mémoire, comme un fiable instrument de mesure, ou le mètre-étalon, d'une certaine qualité de vie ».

La carrière et les chantiers itinérants autour de Taninges deviennent très vite lieux de prédilection, d'abord de son crayon et de ses carnets dont il ne se sépare guère, puis de ses quelques pinceaux, ceux-ci fabriqués maison avec des soies de porcs prélevées sur le dos des bêtes d'un petit élevage voisin.

Dessin d'un ouvrier

Il "croque" ce qu'il a sous les yeux, ce qu'il vit, tant qu'il peut ! Puis réalise de son mieux, avec un plaisir à chaque fois renouvelé, quelques saisissants portraits à la peinture à l'huile de ses rudes et pittoresques compagnons ; ceux-là mêmes qui, sans préjugés, la plupart bien curieux, au contraire, de ses apprentissages dans son travail d'artiste, l'encouragent vivement à poursuivre en se servant d'eux pour modèles. Ce qui, renforçant sa confiance en sa fibre artistique, le touche beaucoup venant de ces êtres dont l'écorce grossière masque souvent - grossièrement aussi - bien des finesses d'esprit avec parfois, au mitan, un grand cœur d'or seulement recouvert, lui, d'un reste de poussière.

 

 

 

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