Lorsque quelqu'un évoque...
Lorsque quelqu'un évoque Serge Fiorio sans même jamais l'avoir connu ou simplement rencontré, ce n'est pas à des images d'un pays de Cocagne que la personne pense mais, le plus souvent, à celles d'un paradis terrestre, qu'elle retrouve intactes, résurgentes, dans le souvenir de tableaux. Impact instantané, mais durable, de cette peinture sur l'esprit, son bonheur stable en partage, sa calme emprise sur les sens ! Même à distance, ou à travers le temps, il suffit alors, c'est vrai, de la voir, de s'y rendre en pensée, pour que, sur-le-champ, le miracle envoûtant se produise à nouveau, comme le charme permanent qui en émane, à chaque fois, quand on s'y plante directement devant.
Puissamment transporté en ce pays rêvé tout haut par le peintre, notre être tout entier s'y établit aussitôt, faisant vibrer nos cordes sensibles : une sorte de paix poétique, délicieusement familière, nous envahit, à l'orée de sensations fortes. Par la peinture, nous entrons de plain-pied en poésie pour regagner le pays d'enfance, en prendre le chemin buissonnier. L'enfance, pleine de forces nouvelles, revigorantes pour l'âme !
Fiorio, Fioretti, les mots sont proches, s'aiment, se correspondent : ainsi, on peut parfaitement arriver à connaître le peintre et, dans son cas, à le connaître au plus haut point, au plus près aussi, par l'intermédiaire des récits de sa vie qu'il a peints, innombrables. Oui, jour après jour, un tableau après l'autre, sa peinture ne raconte pas autre chose que cette dernière et, l'épousant, en suit avec la plus grande attention le déroulement, la reflète, la chante tout haut, à tue-tête, montant tantôt dans les aigus à certains épisodes, puis descendant tout à coup dans les graves selon le cours et la nature des évènements vécus qui, par excellence, en constituent non seulement le mouvement général, mais la ligne mélodique très particulière. Célébré lui-même, le quotidien, et jusqu'au plus prosaïque, y est toujours intimement mêlé à la vie de l'esprit, à son développement, et au rêve, à l'utopie d'un monde neuf, propre, idéalement irréprochable : tout cela ne faisant plus qu'un, pour tout dire, tout au long de l'œuvre. Ce qui, à mes yeux, est aujourd'hui extrêmement rare en peinture.