Texte de Georges Besson.
C'est à l'occasion de la deuxième exposition Fiorio à la Galerie du Haut Pavé, quai Montebello à Paris, en 1961, que le critique et collectionneur Georges Besson rendit compte, dans Les Lettres françaises, de ses impressions devant la peinture de Serge.
Sa collection personnelle fut présentée au Louvre du 11 décembre 1964 au 8 février 1965. Un Fiorio en faisait-il alors partie ?
Je n'ai pas gardé un souvenir précis des œuvres du débutant qu'était, il y a vingt-cinq ans, Serge Fiorio. Haut-savoyard de Taninges avant de devenir cultivateur provençal à Montjustin, où il continue à peindre, non loin de Forcalquier où mourut Dufy.
Avant son actuelle exposition parisienne, j'aurais pu me contenter de dire que Fiorio était un des ces innombrables peintres du dimanche ou peintres naïfs, ou peintres populaires de la réalité, ou encore l'un de ces primitifs modernes qui ont leurs dévots, leurs thuriféraires et même leurs marchands.
Ces autodidactes arrivent souvent à résoudre, à leur insu, certains problèmes de la peinture et la stricte objectivité de ces naïfs, leurs trouvailles instinctives peut devenir poésie.
Pas plus que ses confrères primitifs, Serge Fiorio ne s'exprime par la sensation. Comme eux tous, il ne peint pas ce qu'il voit, mais ce qu'il sait, ce qu'il a appris à connaître : la forme conventionnelle d'un corps, la constitution d'une masse de feuillage dont la représentation est analyse et non fonction de l'effet.
Mais rien n'est moins anonyme que la manière de Serge Fiorio. Il doit son originalité à la qualité de son dessin, à une réelle sensibilité dans l'organisation de ses couleurs. Il représente soit une clairière peuplée de bûcherons ou de moutons, un manège villageois de chevaux de bois, le hameau qui n'a peut-être pas de nom mais qui, situé dans un échelonnement particulier de collines et de champs de culture, s'inscrit bien dans un site de Provence.
Ce sont autant de souvenirs engrangés, amalgamés, simplifiés, que la peinture de ce solitaire, qui, dans une certaines mesure, tel Henri Rousseau, « peint ses songes en croyant peindre le réel. »
Photo Léonore Mau,1961.
Bien que puisse tout d'abord le faire ici penser sa monacale silhouette, l'artiste n'en oublie pourtant pas le moins du monde les nourritures terrestres : deux-trois beaux jambons sont en train de s'affiner, accrochés en attente à la poutre maîtresse de l'atelier !