La tortue et le crapaud par Gui Pascal
Avec son épouse Pascalette, Gui Pascal fait partie de la constellation Fiorio.
Installés à Reillanne dans les années 60, ils y ouvrirent un petit centre d'accueil pour enfants où avait lieu du mime, par exemple, des lectures, toutes sortes d'animations capables d'ouvrir ces jeunes esprits à la plus grande curiosité du monde.
Homme de théâtre, Gui Pascal était aussi peintre, aquarelliste de talent. C'est auprès de Serge qu'il acquit les rudiments techniques de la peinture dite à l’œuf ; Serge lui-même en ayant reçu la recette à sa ferme du Vallon, pendant la guerre, au cours de la visite d'un certain Praxitèle Zographos (1906-1990), peintre d'icônes.
La tortue et le crapaud
D’après un conte de la vieille Chine
Le crapaud aimait tendrement la tortue, et la tortue le lui rendait bien. Ils vivaient ensemble sous un petit rocher qui leur servait d’abri.
Le crapaud entourait son amie de ses soins, voulant lui éviter toute peine. Mais la tortue était aventureuse, elle était ouverte au monde et avide de tout découvrir. Tout lui était neuf et rien ne lui faisait peur.
Le crapaud, lui, voyait partout risques et dangers pour elle !
– Je ne suis pas si fragile, pourquoi veux-tu toujours m’entourer de coton, disait-elle.
– Mais si tu l’es, la preuve en est que la nature t’a donné belle et bonne coquille pour te protéger.
– Justement, je n’ai rien à craindre, et je rends grâce de cela !
Un beau soir, la tortue dit au crapaud :
– Quelle belle nuit, sortons, veux-tu ? Nous irons respirer le vent qui porte toutes les senteurs du monde, et puis je veux voir, voir…
– Voir, voir, que veux-tu voir, la nuit est si noire qu’on ne peut rien voir !
– Si, si, il y a toujours quelque chose à voir, j’en suis sûre, viens !
– Mais avec ton nez à fleur de terre, au premier obstacle tu vas buter et patatras…
– Ça ne fait rien, allons !
Ils sortent.
Ils font trois pas et la tortue heurte une grosse pierre sur le chemin. La voilà les quatre fers en l’air.
– Tu vois, dit le crapaud, je te l’avais prédit, que ne m’as-tu écouté, ah maudite soit cette pierre d’achoppement !
– Ne la maudis pas si vite dit la tortue à la renverse sur le dos, les pattes et les yeux au ciel !
– Ne la maudis pas si vite, répéta-t-elle. Bénie soit-elle au contraire, car grâce à elle, pour la première fois je vois les étoiles !
Gui Pascal – Conteur pour enfants – Reillanne le 18 juillet 1972